Mohammed Oussidhoum dévoile le nouvel haras d’El Jadida !
FILIÉRE ÉQUINE 2016-03-23Rencontre avec la cheville ouvrière du nouvel haras national d'El Jadida. Outre sa casquette de directeur, Mohammed Oussidhoum est aussi un juge respecté, spécialise dans le pur-sang arabe, et un amoureux de la filière équine qu'il dynamise aux côtés de la SOREC.
C’est au milieu d’une grande agitation aussi bruyante que poussiéreuse, que nous avons découvert les travaux impressionnants du chantier du Haras National d’El Jadida. Bruits de machines à la puissance du cheval de Troie, hurlements des ouvriers dans tous les sens, espaces fichtrement garnis de briques, de fils et autres matériels de construction, le tout au sein d’une tornade poussiéreuse que le vent marin adoucit sans en atténuer les échos. C’est dans cette ambiance aux animations constructives que l’équipe de Cheval du Maroc a été accueillie par Mohammed Oussidhoum, le Directeur du Haras d’El Jadida.
Ce jeune fou fieffé des chevaux, vétérinaire de formation et désormais juge A à l’ECAHO (European Conference of Arab Horse Organisation), est aujourd’hui à la tête d’un des cinq haras nationaux du Royaume, celui d’El Jadida (on compte en plus celui de Meknès, Bouznika, Marrakech et Oujda). Cet homme épris des animaux a eu son coup de foudre pour le cheval durant ses années de formation. Aujourd’hui, il dirige, avec ses collaborateurs et dans sa circonscription hippique, toute une structure réssuscitée par la SOREC pour le développement stratégique de la filière équine, et ce avec une passion qui ne manque pas d’échapper autant à ses mots qu’à ses actes. A l’occasion du Salon du Cheval, la SOREC donne rendez-vous aux amoureux des chevaux pour découvrir un haras dont l’infrastructure ne fait pas de compromis avec la perfection : elle l’incarne.
C’est grâce à cet homme et à toute l’équipe qu’il dirige, que la SOREC a pu faire renaître le Haras National d’El Jadida, haras dont la construction remonte à l’époque du protectorat. Alors que le sablier se déversait avec toujours plus de pression, nous avons retrouvé Mohammed Oussidhoum et son équipe du chantier en pleine course contre la montre.
Peu de temps restant avant l’inauguration du Haras National d’El Jadida, énormément de travaux encore à faire, un compte à rebours des plus stressants et par-dessus tout, un Salon d’envergure internationale prévu pour sa huitième édition du 13 au 18 octobre prochain. Malgré toutes ces contraintes, cet homme aussi généreux qu’acharné a accepté de nous offrir un peu de son temps précieux pour nous parler de l’infrastructure du Haras et des activités afférentes.
Cheval du Maroc.- Qui est Mohamed Oussidhoum, l’homme à la tête du Haras National d’El Jadida dont tout le monde attend l’inauguration ?
Mohammed Oussidhoum.- Un simple monsieur qui aime son travail et dont le concours de circonstances a fait qu’il a atterri à El Jadida avec sa famille depuis quelques années. Je suis vétérinaire de formation, j’ai fait mes études à l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II à Rabat et j’ai eu mon diplôme en 1994. Après avoir eu mon diplôme j’ai directement intégré le Haras National de Bouznika. Mon arrivée en tant que directeur du Haras National d’El Jadida est un pur concours de circonstances. Je jouis d’une maîtrise technique assez conséquente et je suppose que cette expérience m’a valu le mérite mais surtout la responsabilité de cette position. Nous nous sommes installés ma famille et moi à El Jadida en 2012, une année avant le début de la reconstruction de ce Haras.
Quelles différences voyez-vous entre les Haras Nationaux du Royaume ?
Je n’ai malheureusement pas eu l’occasion d’exercer mon métier dans tous les Haras Nationaux du Royaume. Disons déjà que nous en avons cinq dont on peut être bien fiers : Meknès, Bouznika, Oujda, Marrakech et celui là même d’El Jadida. Et tous sont inscrits aujourd’hui dans la stratégie de remise à niveau dans laquelle s’est engagée la SOREC. Le Haras Régional de Meknès est reconnu comme étant un bijou national. Il est à la fois un haras régional et une jumenterie qui constituent une réelle plateforme pour les éleveurs mais également une fierté de la ville et de la région, ne serait ce que pour sa richissime histoire. Il est l’un des plus anciens du Royaume (construit entre 1914 et 1920) et le plus appropriés à illustrer la noblesse de la filière équine au Maroc. Il faut savoir que le Haras Régional et la Jumenterie de Meknès s’étalent sur une grandiose superficie de 67 hectares dont 30 sont consacrés à l’Hippodrome. Ce dernier est déjà le théâtre de courses depuis quatre ans déjà.
Le Haras National de Bouznika a une valeur affective pour vous...
Le Haras de Bouznika a une valeur émotionnelle, puisque c’est le premier Haras où j’ai travaillé après avoir été diplômé. C’est sur place que j’ai pu mettre en pratique mes apprentissages, développer mes compétences et aussi découvrir la dimension managériale que je ne connaissais pas encore sur un terrain aussi exigeant qu’un Haras National.
Globalement, chaque haras a ses spécificités...
Que ce soit sur le plan de l’histoire, de la superficie ou des équipements, vous avez raison. Et ils sont tous aussi indispensables les uns que les autres, que ce soit pour les amoureux du cheval ou pour les gens non spécialement sensibilisés à l’amour de l’activité équine.
Racontez-nous votre expérience dans le Haras de Bouznika ?
Ce fut ma première expérience professionnelle. J’ai intégré le Haras National de Bouznika en tant que vétérinaire. Comme je l’ai précédemment mentionné, mon sujet de thèse m’a permis de maitriser les principes de l’échographie, ce qui m’a facilité la pratique de l’échographie gynécologique chez la jument: étudier l’état de la jument. Est-elle dans son cycle ? Est-elle en chaleur ? Est-elle gestante ou non? A-t-elle déjà ovulé ou pas encore ? Est-ce que la matrice est propre ou pas ? Nous recevions, si mes souvenirs sont bons, entre 15 et 30 juments par jour, et ce de février à juin de chaque année.
Le Haras National d’El Jadida prend forme de jour en jour depuis 2013. Que pensez-vous de cette structure soumise à votre direction ?
Avant de répondre à cette question, je tiens à saluer vivement les efforts déployés par la SOREC et à sa tête son Directeur Général, Monsieur Omar Skalli, pour la remise à niveau de ses infrastructures en particulier et le développement de la filière équine en général. Il s’agit d’une réelle valorisation du rôle du cheval dans l’économie nationale mais également un engagement dans la démocratisation de cette activité à fort potentiel.
Quels seront les grands atouts du nouvel haras d’El Jadida qui promet de devenir une des grandes fiertés de la filière équine marocaine?
Ce Haras, construit en 1931 par le protectorat français, sera un vrai joyau. Tout a été démoli et la reconstruction a commencé depuis les fondations. Quatre entreprises mènent en parallèle l’activité de construction et chacune s’occupe d’un volet particulier : bâtiments, aménagements extérieurs, espaces verts et paddocks. Au niveau de la structure, il faut admettre qu’elle est très bien équipée et surtout bien fonctionnelle : 4 écuries pour les étalons, 2 écuries pour les juments, un pôle élevage armé de son équipe et de son système informatique pour traiter tous les dossiers des chevaux et répondre aux doléances des éleveurs, un complexe de reproduction, des paddocks de détente, des aires d’exercices des étalons pour assurer leur bien être, etc….
Parlez-nous de votre amour pour le cheval... Héritage familial ou passion personnelle ?
Sincèrement, personne dans ma famille n’est épris des animaux en général, encore moins par le cheval, si ce n’est ma femme qui est également vétérinaire. Ma passion pour le cheval s’est révélée lors de la préparation de mon projet de thèse doctorale, qui portait sur l’échographie du boulet et du paturon chez le cheval. Cet amour pour cet animal aussi noble que fier a pris davantage d’ampleur lors d’un stage que nous avons effectué au niveau de l’Ecole Royale de Cavalerie, à Témara. Pendant six mois, nous avons eu la chance de pratiquer l’équitation dans les règles de l’art. Ce fut inoubliable, avec un régime militaire, j’ai été initié aux pratiques de l’équitation : terrains variés sans étriers, sauts d’obstacles, concours complet, etc… Mais cela n’a duré que six mois : Comme quoi, toute bonne chose a une fin. (Rires !)
Vous considérez-vous comme un cavalier ?
Je ne vous cache pas que le travail occupe énormément de temps dans ma vie. Il empiète même sur ma vie privée et familiale. Toutefois, dès que j’ai la possibilité de monter à cheval, je ne la rate sous aucun prétexte. Je ne dirai pas que je suis un cavalier confirmé, ce serait trop prétentieux tout de même. Je fais parfois des randonnées à cheval avec des amis et aussi de l’endurance.
Et qu’en est-il de la carrière du juge Mohammed Oussidhoum ?
La carrière de juge est une autre casquette, mais reste toujours inscrite dans le cadre de l’activité équine. Il s’agit de l’ECAHO (l’European Conference of Arab Horse Organizations) où l’on devient juge spécialisé dans le pur-sang arabe. Là, je viens d’avoir mon statut de Juge A en Pologne.
Et si l’on enlevait la casquette de directeur de Haras National d’El Jadida et celle de juge pour ne parler que de Mohamed Oussidhoum, l’homme ?
Vous savez, chacun est à soi même le plus éloigné. Mais si je suis obligé de répondre, je dirai que je suis un passionné du travail, que j’aime ma famille même si je ne passe pas beaucoup de temps avec elle. Je suis une personne très pointilleuse et je peux parfois même être enquiquineur. Je suppose que c’est dû à mon côté perfectionniste qui veut que tout soit exactement comme il faut. Si je devais parler des qualités, je dirais que je suis quelqu’un de modeste et curieux qui aime beaucoup apprendre. Je me permets aussi de mettre la dimension de la compétence et de l’expérience professionnelle dans la même liste.
Si vous deviez avoir un cheval à vous, quelle race choisiriez vous ?
Question très difficile, ce n’est pas si accessible que cela d’avoir un cheval. (Rires !) Mais si je devais choisir, je dirai un barbe ou un pur-sang arabe.